Ville & Campagne
A la campagne, il y a des maisons d'habitations, des sentiers pédestres ou équestres, des zones de loisirs, des exploitations agricoles, des champs, des vignes, des prairies, des troupeaux… Toutes ces facettes de la campagne représentent autant d'usages et de perspectives différentes. C'est pourquoi « Vivre ensemble » à la campagne est une véritable cohabitation à orchestrer. Depuis plusieurs années, des questions se posent régulièrement, relatives aux divers usages de la campagne.
Formellement, les activités qui ont des effets sur l’organisation du territoire sont coordonnées par des plans d’affectation, qui règlent le mode d’utilisation du sol. Ces plans délimitent en premier lieu les zones à bâtir, les zones agricoles et les zones à protéger. Le canton définit plus spécifiquement l'affectation de ces zones.
La zone agricole sert à garantir la base d’approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l’équilibre écologique.
Quels sont les droits de voisinage ? Quels sont les droits des agriculteurs ?
Les agriculteurs s'appuient sur les développements techniques et scientifiques et ont à cœur de répondre aux attentes de la population en terme de qualité de produits, pratiques respectueuses de l'environnement, limitation des résidus de produits phytosanitaires (PPh) dans les aliments et dans l'eau, tout en devant également faire face aux défis climatiques, à l'augmentation des maladies fongiques et des ravageurs des cultures provenant d'une part des changements climatiques, d'autres part des transports internationaux (aéroport et gare internationaux).
Certaines pratiques restent malgré tout critiquées, voir même dénoncées, alors qu'elles trouvent toutes justifications non seulement dans une production agricole respectueuse de l'environnement mais également dans les textes de loi.
Quelques problématiques rencontrées avec explications à la clef :
L'agriculteur a-t-il le droit de travailler la nuit?
L'agriculteur a le droit de travailler la nuit parce que …
Les moissons et autres récoltes des cultures sont dépendantes des conditions météorologiques et doivent parfois être effectuées avant l’arrivée d’un orage ou de la pluie.
Concernant les foins et regains, la fauche de nuit se déroule en dehors du vol des abeilles et autres insectes utiles, ce qui permet de les sauvegarder.
Les interventions concernant l’application des produits phytosanitaires, tard le soir ou tôt le matin, ont l’avantage de se dérouler dans des conditions optimales (peu ou pas de vent, humidité relativement élevée), ce qui permet d'éviter d'une part les dérives qui pourrait être dû au vent, d'autres part une lixiviation (=lessivage) du produit en cas de forte pluies. De plus il n'y a pas d'abeilles la nuit, et certains ravageurs sont mieux ciblés à ce moment là, comme par exemple les thrips.
Dans la législation fédérale, c'est l’Ordonnance sur les règles de la circulation routière (OCR, RS741.11) qui réglemente les interdictions de circuler le dimanche et de nuit.
Conformément à l’art. 91a OCR, les véhicules agricoles sont autorisés à circuler les dimanches et jours fériés, ainsi que de nuit, soit entre 22h et 5h.
Quelle est la limite de bruit autorisée en ce qui concerne les activités agricoles ?
Le Service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (SABRA) s'occupe, entre autres, d'élaborer et de mettre en œuvre la stratégie fédérale et cantonale de protection de l'air, les plans de mesures pour l'assainissement de l'air et du bruit.
Les bruits produits par les activités agricoles sont régis par l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB).
Le degré de sensibilité au bruit légalement acceptable en zone agricole est un degré de sensibilité III. Cela signifie que les valeurs de planification (VP) sont de 60 dB(A) de jour et de 50 dB(A) de nuit. La nuit est définie de 19h00 à 07h00.
Le calcul décrit dans l’annexe 6 de l’OPB est relativement complexe et prend en compte des facteurs liés à la période (jour/nuit), à l’aspect tonal et impulsif du bruit, ainsi qu’à la durée de la nuisance. L'évaluation de la nuisance sonore générée par l’activité agricole tient compte des éléments suivants :
- Le nombre de jours successif d’utilisation du tracteur sur les parcelles concernées
- L’horaire des activités
- Les caractéristiques acoustiques de l'engin agricole (puissance acoustique).
Le paysan peut utiliser ses engins à moteur (tracteur, pulvérisateur, moissonneuse batteuse, par exemple), du moment que les valeurs de planification (VP) sont respectées au droit de la fenêtre la plus exposée de votre logement.
Par expérience, ce type de bruit respecte généralement les exigences de l’OPB car le temps d’utilisation est considéré comme court en regard de la durée totale de la nuit.
Toute question complémentaire sur l'application de l'OPB peut être adressée au SABRA.
Pourquoi ça sent mauvais ? L'agriculteur a-t-il le droit de puriner ou de déposer des composts?
Qu'est-ce que le purinage? Et pourquoi purine-t-on?
Le purinage est le fait d'épandre un mélange de lisier et d'eau afin de renforcer le sol et le rendre plus fertile. En effet le purin est riche en éléments nutritifs, éléments essentiels pour la croissance des plantes. Cela permet de limiter, voire d'éviter d'utiliser des engrais chimiques, ce qui répond également aux préoccupations de la population quant aux questions environnementales et sociétales.
Malheureusement cette méthode est décriée en raison des fortes odeurs que cela peut entraîner.
Depuis le 1er janvier 2024, les engrais de ferme liquides, tels que le lisier, doivent être épandus de sorte à limiter au maximum les gaz rejetés, en recourant, par exemple, à des « pendillards » (OPAir).
Y-a-t ‘il en Suisse voir sur le canton des restrictions quant à l'épandage d'engrais et/ou de produits phytosanitaires près des habitations, jardins, places de jeu, établissements accueillant des enfants ?
La charge polluante admissible de l’air est réglée au niveau fédéral, par l'ordonnance sur la protection de l'air du 16 décembre 1985 (OPair; RS 814.318.142.1). Cette ordonnance fixe les valeurs limites au-delà desquelles les émissions sont considérées comme excessives, soit notamment lorsqu'elles menacent l'homme.
Le DETEC émet des recommandations qui traitent des exigences relatives à la protection de l'environnement dans l'agriculture, et a notamment publié un module intitulé "Eléments fertilisants et utilisation des engrais dans l'agriculture", qui détaille les bonnes pratiques en la matière. L'azote et le phosphore font l'objet d'une attention particulière, dès lors qu'ils ont un impact important pour l'environnement. Toute personne qui épand de l'engrais doit prendre en compte les principes de fumure, soit les éléments nutritifs présents dans le sol et les besoins des plantes en éléments nutritifs, les conditions propres à la topographie du site et ses éléments pédologiques, les conditions météorologiques, et bien évidemment, les restrictions légales.
Ainsi, l'utilisation d'engrais doit se limiter au strict nécessaire, toute utilisation devant se justifier du point de vue agronomique. L'épandage d'engrais contenant de l'azote (lisier, fumier, jus d'ensilage) n'est autorisé que pendant les périodes où les plantes peuvent l'absorber. L'épandage d'engrais liquides sur un sol gelé, couvert de neige, saturé d'eau ou desséché est interdit. Ces engrais sont des substances servant à la nutrition des plantes et peuvent être épandus sur les champs. Il n'est pas prévu de limite de distance par rapport aux habitations. En revanche, il est interdit d’épandre des engrais :
Dans des régions classées réserves naturelles en vertu de la législation fédérale ou cantonale, à moins que les prescriptions ou les conventions déterminantes en disposent autrement ;
Dans les roselières et les marais auxquels ne s’appliquent pas déjà les réglementations au sens de la disposition ci-dessus ;
Dans les haies et les bosquets, ainsi que sur une bande de 3m de large le long de ceux-ci ;
Dans les eaux superficielles et sur une bande de 3m de largeur le long de celles-ci ;
Dans les espaces réservés aux eaux ;
Dans la zone S1 de protection des eaux souterraines, à l’exception de l’herbe fauchée laissée sur place ;
En forêt (y compris les pâturages boisés) et sur une bande de 3m de large le long de la zone boisée.
Les dispositions relatives à la protection de l'environnement dans l'agriculture sont complétées par le dispositif des contributions versées aux agriculteurs. En effet, les paiements directs ne sont versés que si les exigences liées aux prestations écologiques requises sont respectées (cf. art. 11ss de l'ordonnance sur les paiements directs (OPD), RS 910.13). Plus particulièrement, des techniques d’épandage diminuant les émissions lors d’application de lisier ou d’engrais sont encouragées par le biais des paiements directs.
Selon décision du Conseil fédéral du 3 novembre dernier, l’épandage en bande par distributeur avec rampe d’épandage à tuyaux souples (pendillards) ou à tuyaux semi-rigides équipés de socs, l’épandage par enfouissement dans des sillons ouverts ou fermés, l’épandage avec un déflecteur sur des surfaces de terres arables (pour autant que les engrais de ferme liquides épandus soient enfouis dans le sol dans les heures qui suivent), sont obligatoires et l'épandage non conforme sanctionné d'une amende, depuis le 1er janvier 2024. Pour avoir plus d'information sur l'obligation d'utiliser des pendillards dès 2024, veuillez cliquer ici.
Qu'en est-il du stockage d’engrais de ferme provisoire en bord de champ?
Cette pratique est tolérée pour de brèves périodes afin de faciliter la gestion des effluents, jusqu’à l'épandage et ne remplace pas la nécessité de disposer de fumière avec récupération des jus sur l'exploitation agricole.
Les directives en matière de stockage au champ sont les suivantes :
Le stockage n’est autorisé qu’un an au maximum et le temps de retour sur le même emplacement est de 4 ans.
Le stockage doit se situer à proximité d’un chemin carrossable et sur un sol de préférence moyen (ni trop sableux, ni trop lourd).
Le stockage est interdit à moins de 30 mètres des eaux de surface (lacs, cours d’eau, etc.), à moins de 3 mètres des haies, lisières de forêts et bosquets, au bas d’un chemin ou d’une pente, en zone S de protection des eaux en zone naturelle protégée, en surface de compensation écologique ou en surface extensive, au-dessus du passage de drains et en zone inondable.
L’absence de bâchage est tolérée à Genève mais il est vivement conseillé pour éviter le lessivage, surtout en période de fortes pluies.
En revanche, le site doit être « propre » : pas de flaque de jus ni d’écoulement dans la parcelle et en dehors qui conduirait à la pollution des eaux.
Pourquoi peut-on épandre du purin mais pas des crottes de chien ?
Le purinage est le fait d'épandre un mélange de lisier et d'eau afin de renforcer le sol et le rendre plus fertile. En effet le purin est riche en éléments nutritifs, éléments essentiels pour la croissance des plantes. Cela permet de limiter, voire d'éviter d'utiliser des engrais chimiques, ce qui répond également aux préoccupations de la population quant aux questions environnementales et sociétales.
Par contre les crottes de chien contiennent des bactéries (type E.coli, Salmonella) et des parasites. Ce qui peut contaminer les sols et les cultures.
Au niveau légal, "Toutes déjections animales, dont la consistance le permet, doit être ramassée au moyen d'un sachet ou d'un autre contenant analogue par la personne sous la surveillance de laquelle l'animal est placé." Il s'agit de la teneur de l'alinéa de 1 de l'article 8 du règlement sur la salubrité et la tranquillité publiques (RSTP) E 4 05.03 dans sa teneur la plus récente, incorporant les dernières modifications au 9 mai 2018.
Cet article 8 s'applique sur l'ensemble du domaine public du canton, et donc aussi sur la plus grande partie des chemins de promenade. Vous noterez qu'il ne fait aucune différence entre chiens et chevaux. Les cavaliers n'ont donc pas plus le droit que les promeneurs de chiens de laisser leurs déjections sur les chemins de promenade.
Si vous pensez que ce règlement est appliqué de manière inégale, il faut savoir que c'est la police cantonale et les polices municipales qui doivent le faire appliquer, et que c'est donc à elle qu'il faut s'adresser pour en comprendre les raisons.
Une raison possible est que les déjections canines soient considérées, à juste titre, comme moins hygiéniques que le crottin de cheval, ce qui justifierait une priorisation dans l'application du règlement.
Une autre raison se base sur le fait que pour les chiens, l'obligation de ramasser les déjections est également formulée dans une loi qui leur est spécialement dédiée, soit dans la loi sur les chiens (M 3 45, dernières modifications du 14 mai 2018) à l'article 21, alinéa 2 (à noter en passant que cet article ne s'applique pas seulement au domaine public, mais aussi aux culture et aux espaces naturels).
Est-ce que le pulvérisateur utilisé est conforme pour une utilisation à proximité de maisons ?
La protection des plantes qui se veut économique et écologique exige une application exacte et ciblée des produits. Cela requiert un entretien régulier et un contrôle périodique des pulvérisateurs.
Les objectifs principaux de ces contrôles sont :
d’obtenir une protection des plantes optimale avec une quantité de produit minimale ;
de réduire les risques d'atteintes à l'environnement engendrés par les produits phytosanitaires ; la manipulation des produits de traitement et de la bouillie requiert le plus grand soin. Il faut appliquer la tolérance zéro en matière de résidus dans les canalisations ;
d‘améliorer la sécurité des personnes utilisant les pulvérisateurs ;
de déceler les usures à temps, d’améliorer la technique d‘application ;
de garantir un travail de qualité supérieure.
L'Ordonnance sur les paiements directs à l'agriculture (RS 910.13, 6.1) stipule que les pulvérisateurs doivent être testés au moins tous les trois ans. L’année civile sert de référence. Si un pulvérisateur a été testé en 2025, le prochain contrôle est à effectuer en 2028. Le moment où le test est effectué durant l’année civile ne joue aucun rôle.
Un pulvérisateur qui passe le test avec succès ne délie l’utilisateur ni de son devoir de l’entretenir, ni d'examiner périodiquement les réglages appropriés à chaque culture.
J'ai mon jardin et ma maison qui jouxte une parcelle viticole, quelles sont les distances de sécurité à respecter vis-à-vis des traitements ?
Une zone tampon non traitée doit être respectée (3, 6 ou 20m selon le risque): la largeur de la bande tampon est indiquée sur les prescriptions d'utilisation des produits concernés et cette distance peut être réduite en recourant à des mesures techniques de réduction de la dérive, conformément aux instructions du service d'homologation.
Mesures de réduction des risques
Pourquoi je ne peux pas me promener dans les champs, même s'il n'y a pas de barrière ?
La zone agricole sert notamment à garantir la base d’approvisionnement de la population et à assurer l’équilibre écologique.
La production agricole représente le revenu des agriculteurs. Le fait de marcher sur les cultures qui sont en cours de développement, les endommage et les empêche de croitre correctement. Ce qui entraine des pertes de production et donc de rendement.
C'est pourquoi il est interdit à ceux qui ne sont pas des ayants droit de pénétrer ou de laisser pénétrer un animal dans l'aire agricole. Seuls les propriétaires (ou autres titulaires d'un droit réel), les exploitants et leurs employés, les services officiels et leurs représentants peuvent se trouver sur les terrains affectés ou appropriés :
a) à la grande culture;
b) à l’élevage;
c) à la viticulture;
d) à la culture maraîchère;
e) à l’arboriculture fruitière et ornementale;
f) à l’horticulture;
g) aux surfaces de promotion de la biodiversité.
Mêmes les parcelles qui ne semblent pas cultivées, comme des prairies, des haies, des arbres fruitiers haute-tige ou encore des jachères florales, sont interdites d'accès. En effet, ce sont des surfaces de promotion de la biodiversité. Cela signifie qu'elles fournissent, en favorisant une variété de formes de vie, de nombreux services écosystémiques, comme la pollinisation, la fertilité des sols et la régulation naturelle des organismes nuisibles. Ainsi, on préserve et on favorise les espèces indigènes et leurs habitats.
C'est parce que ces surfaces sont utiles non seulement à l'agriculture, mais également à l'ensemble de la population, que la Confédération verse des contributions aux exploitants agricoles, en fonction de la qualité des surfaces et des engagements pris par ces derniers, notamment concernant leur entretien.
Pour aller plus loin, n'hésitez pas à cliquer sur la Loi sur la police rurale et règlement d'application.